Sommets de Bruxelles, madame porte la culotte

Sans légitimité politique et sans un gros travail de fond sur les dossiers les actes ne peuvent pas étayer les seules rodomontades. Nicolas Sarkozy vient de l'apprendre, une nouvelle fois, à ses dépens, mais aussi aux nôtres, lors du double sommet de Bruxelles qui s'est achevé au petit matin blafard ; blafard comme le teint du Président de la République Française....

Tout juste a-t-il eu la piètre compensation d'une co-conférence de presse, que la Chancelière Merkel a bien voulu lui accorder le dimanche 23 octobre à l'issue de la première partie du sommet européen. Et peut-il aussi s'accrocher au fait que les Grecs n'ont pas été poussés au défaut, à supposer que cela fut la réelle volonté allemande comme l'ont laissée entendre certains membres de l'entourage présidentiel. Mais cette "victoire" prend des allures de marché de dupes !

Car sur les deux points essentiels, la part des créances que les banques devront laisser dans le sauvetage de la Grèce (au moins 50% martelaient les Allemands ; l'accord du 21 juillet et rien que l'accord du 21 juillet rétorquait Sarkozy, soit 21% - les banques françaises sont très engagées dans le processus d'endettement grec) et la volonté de l'Elysée de donner le statut de banque au Fonds de secours, les demandes française ont été rejetées et Berlin a eu gain de cause.

Cela traduit aussi la base politique solide sur laquelle s'appuyait la chef du gouvernement allemand. Entre les deux sommets de dimanche et mercredi/jeudi, elle a su obtenir de son Parlement un mandat clair et une approbation massive des options présentées par l'Allemagne. Sarkozy, toujours prompt à agir sur impulsion n'est jamais parvenu ni à "mouiller" sa majorité, mise devant le fait accompli, ni à associer l'opposition à une quelconque plateforme commune sur le traitement français qu'il convenait de prescrire pour combattre l'endettement et résoudre la crise de l'euro.

Et la perte du mythique triple A est désormais plus qu'une option : sans cette cotation les chances de réélection de l'actuel locataire de l'Elysée se réduisent comme peau de chagrin ! Moody's et Standard & Poor's viennent d'annoncer publiquement leurs hésitations quant au maintien du précieux sésame : rendez-vous est pris dans 3 mois pour la suite…

Le Président français a en outre réussi l'exploit de se chamailler avec l'anglais David Cameron ("Nous en avons assez de vous entendre nous critiquer", a lâché Nicolas Sarkozy, irrité par les critiques des Britanniques sur la gestion de l'euro) mais aussi d'humilier son homologue italien Silvio Berlusconi lors de la conférence de presse évoquée plus haut. Les sourires de connivence entre les deux protagonistes lorsque fut évoquée, au détour d'une question, la force de l'engagement italien à mettre en place son plan de désendettement, ont du mal à passer chez nos ami(e)s transalpin(e)s… La Chancelière fédérale a au moins eu l'élégance de présenter ses excuses !

Bref à Bruxelles le couple franco-allemand s'est mué en un cavalier seul, madame Merkel porte la culotte et le petit Nicolas s'est retrouvé tout transi lorsque la bise d'Angela est venue.

Mais c'est bien entendu pour le pays, sa crédibilité, son poids sur les scènes européennes et internationales que cela pose un grave problème. Et on se plait à rêver à ce qu'aurait pu donner une délégation française emmenée par un vrai homme d'Etat, Dominique de Villepin…